Dans un article d'opinion publié au journal Le Temps, le chercheur de l'Université de Genève François Fleuret utilise le terme "d'étranges esprits" pour qualifier les modèles de langages (LLM) que sont GPT-4 d'OpenAI, LaMDA de Google, ou LLaMA de Meta, et leur capacité à "démontrer des étincelles de raisonnement", comme il le formule.

Voici comment il motive cet usage, ancré dans une critique de la tendance à anthropomorphiser ces entités :

Ces modèles sont des esprits étranges, dont le comportement nous semblefami-
lier, mais avec une origine,une structure et une relation à la réalité totalement différentes des nôtres. Notre humanité leur est parvenue comme un écho lointain à travers nos écrits, mais ce que vous savez des humains, votre aptitude à inférer ce qu'un humain fera, ou pensera, n'a pas de raison de s'appliquer. Si vous devez évoquer une image quand vous interagissez avec une de ces entités, cela devrait être celle d'une créature de science-fiction informe venant d'un autre monde, plutôt que celle d'un humain, aussi bizarre soit-il.

Dans la continuité des billets antérieurs à propos de la métaphore Lovecraftienne, cette proposition est intéressante dans le sens où elle souligne en quoi les experts du domaine ont recours eux-même au lexique de l'étrangeté pour expliquer leur champ de recherche.